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Bosch sixième saison. Soixante épisodes d′une heure, déjà ! La septième saison est en préparation. Bosch pourrait durer encore des décennies que cela ne changerait rien. On retrouve toujours Bosch avec le même sentiment de confort. La méthode est éprouvée, le personnage interprété par Titus Welliver est peaufiné, la mécanique du récit tourne sans risque de s′enrayer. On connaît par coeur tous les ressorts de ce genre d’histoires policières. Harry Bosch loge toujours dans sa sublime maison au-dessus de Los Angeles, comme un rapace dans son nid perché dans la montagne. Sa femme Eleonor, étant décédée, Maddie, sa fille, grandit à ses côtés et a désormais un petit ami, c′est la seule révolution de cette saison.

Bosch constat
La narration de Bosch est invariable. C’est un tissage où plusieurs récits s′enlacent, sans masquer le principal, mais où un récit secondaire prend le relais sitôt que le premier est résolu. On pourrait continuer ainsi indéfiniment, en alimentant le métier à raconter de nouvelles bobines de fiction.

Cette fois, nous avons trois récits : une enquête sur le meurtre d′un scientifique qui a dérobé du césium radioactif, une enquête menée par Jerry, le partenaire de Bosch, au sujet d′un trafic de drogue tenu par un ancien tonton-macoute (1) et une dernière enquête au sujet de la disparition d′une adolescente quelques années plus tôt.

Bosch Proust
Jusqu′alors, Harry Bosch avait des relations houleuses avec sa hiérarchie du fait de son refus des compromissions et de la corruption. D′un autre côté, ses méthodes irrégulières lui avaient toujours fait encourir le risque d′une mise à pied au point que l’enquête devenait vite une course contre la montre pour découvrir le coupable avant de se voir retirer son insigne. Il avait même eu droit à une suspension entre la première et la deuxième saison.

En plus des hantises propres aux vétérans de la guerre du Vietnam, le nœud de sa psychologie tenait à l′assassinat de sa mère, une prostituée, lorsqu′il avait onze ans. Ce n′est pas le jazz de Coltrane pour lequel il avait – et a toujours – une affection particulière qui lui permettait d′échapper à son enfance d′orphelin ni à la hantise du meurtre primordial. Bien au contraire, il ne faisait qu’entretenir son décalage avec un monde qui n’était plus le sien.
Marcel Duhamel, le créateur de la collection Série noire chez Gallimard définissait aussi le genre hard boiled né avec Dashiell Hammet et Raymond Chandler : L’immoralité côtoie les beaux sentiments, l’esprit est rarement conformiste et les policiers sont aussi corrompus que les mafieux. Ce qui compte est l’action, la violence, l’angoisse, les états d’âme qui se traduisent par des gestes, la passion sans frein, la haine. Le tout débouchant sur de l’humour et une nuit blanche. Harry Bosch relève de cette lignée.

Cependant, la découverte de l′assassin de sa mère à la fin de la quatrième saison semble avoir rompu le cours de la fatalité.

Bosch Père + Fille
Désormais veuf, solitaire, soutenu par un chef de la police intègre et cohabitant pacifiquement avec sa fille, Harry Bosch a pris du recul et gagné en sérénité. Certes, il y a bien encore les vices du système judiciaire américain qui l′agacent, mais il s′est visiblement fait une raison. Il ne déroge plus à la procédure et s′il montre de la mauvaise volonté à collaborer avec le FBI, cela relève d′une vieille tradition de rivalité entre polices.
Et c′est ainsi que le spectateur, lui, commence à s′ennuyer.
Michael Connelly est un auteur de polars à succès, la série d′Eric Overmyer est un succès, Titus Welliver, Jamie Hector, Amy Aquino, Lance Reddick et leurs camarades sont des acteurs solides, l′histoire n′est pas plus mauvaise qu′une autre. Alors pourquoi la série perd-elle de l′intérêt ?

Bosch Interrogatoire veuve

Il y avait pourtant des pistes. Dans la tradition, la séduisante veuve du scientifique assassiné aurait fait une mante religieuse tout à fait crédible, Bosch reste hélas insensible à ses charmes. De même, l’agente du FBI intègre qui a dû abattre un collègue corrompu, lance un discret appel à Bosch, mais celui-ci n’entend délibérément rien. Ce n’est pas qu’il manque d’empathie, il s’est seulement asexué au fil des années.

Bosch FBI
L’explication de cette évolution de la série peut passer par son esthétique, par la façon dont le scénariste Eric Overmyer et le chef-opérateur Eric Alan Edwards montrent à présent Los Angeles, tant il est évident que Bosch et Los Angeles ne font qu’un.

Les scènes de nuit, si nombreuses aux débuts de la série, se sont considérablement réduites, à l′exception de celle qui sert de point d′orgue dans chaque épisode : la vue des lumières de Los Angeles depuis la maison de Bosch. Dans la sixième saison, la grande majorité des scènes se déroulent de jour et les scènes nocturnes sont plutôt attribuées à son collègue Jerry. Cette constatation rejoint ce que je disais à l′instant de la psychologie d′un héros qui n′a plus rien à régler de son passé. Bosch existe maintenant à la lumière du soleil, à la vue de tous. Il ne court plus les ruelles étroites et obscures pour traquer un criminel. Aucune souffrance ne hante plus sa nuit intérieure. Aucun désir n’exige plus de pénombre pour se déployer. Or la profondeur d′un personnage, comme celle d′une image, nécessite un arrière-plan un peu flou et quelques zones d′ombres. À défaut, le héros, justement, n′est plus qu′une image. Et c’est ce qu’est devenu Harry Bosch.

Note :

1- Comme on le constate sur l’image au-dessous, ce criminel haïtien notoire lit Proust en collection Pléiade…

Bosch est un feuilleton américain adapté par Eric Overmyer de l’oeuvre de Michael Connelly et diffusé sur Amazon Prime. Il est interprété notamment par Titus Welliver, Jamie Hector, Amy Aquino, Lance Reddick , Madison Lintz…

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